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VASSIL(Jean Vassilef dit)

L’ART DU MOUVEMENT

Vassil est né en 1949 à Drancy dans la banlieue est de Paris. La famille est modeste et le jeune garçon affirme très vite une réelle volonté de se battre pour réussir dans la vie. Dès son plus jeune âge, il s’intéresse à l’art, et plus particulièrement à la peinture. Il s’y adonne en autodidacte passionné et curieux. La sculpture ne viendra que plus tard et il s’y jettera avec ferveur, prenant appui sur les bases solides acquises grâce à la peinture.

Lion agressif

Il commence par la taille directe, discipline exigeante et ardue à laquelle il consacre tout son temps. Perfectionniste, en constante recherche, sa soif d’absolu le conduit bientôt vers le marbre, un matériau noble qui lui permet de s’exprimer de manière plus fine et plus subtile. Son art est figuratif ; il se concentre sur le rendu de l’expression la plus vraie, la plus significative. Après cinq années à se mesurer avec la pierre, il abandonne cette technique pour se tourner vers le modelage et son prolongement naturel, la reproduction de ses modèles dans le bronze. Le modelage lui ouvre des possibilités nouvelles, plus en accord avec le mode de création qu’il entend poursuivre, lequel est tourné vers le rendu du mouvement, de la vie, des émotions.

C’est à partir de là qu’il s’oriente résolument vers la sculpture animalière. Ses œuvres expriment sa passion pour le monde animal, un monde avec lequel nous perdons de plus en plus le contact, déplore-t-il.

Le choix de l’animal dans son travail de sculpteur vient, selon lui, de la similitude évidente entre la communication animale et la sculpture en tant qu’art, le langage corporel de ces êtres étant plus ouvert et plus universel que le langage parlé. Sa connaissance de l’animal ne s’arrête pas à une simple transposition plastique visant à traduire uniquement sa beauté. L’animal est pour lui un être à part entière, unique, et c’est pourquoi il s’intéresse particulièrement à son comportement et à son mode de vie dans son milieu naturel. Grâce à l’éthologie, notamment, il étudie « les mœurs » des animaux sauvages, leurs habitudes, leurs attitudes, leurs réactions, leurs ruses, leurs peurs, mais aussi leur calme, leur quiétude, leur tendresse, … Il peut alors imprimer dans la matière inerte toutes les facettes de l’instinct incomparable dont fait preuve en toutes situations la faune sauvage qui lui sert de modèle.

Son savoir inépuisable sur le sujet nous éclaire sur son aptitude à comprendre et à transmettre la force des émotions originelles communes à la grande famille animale dans laquelle il inclut évidemment l’homme. Il nous donne à voir la vie difficile des animaux, la lutte permanente pour survivre, pour le territoire, pour s’accoupler, pour élever les petits, une vie durant laquelle existent des moments de tendresse, de calme ou de jeux qu’il aime à mettre en scène. Cette démarche amène tout naturellement le sculpteur à privilégier deux types d’expression : les portraits et les groupes.

Fuite

Le portrait lui permet de fixer un sujet dans son essence, de comprendre son passé et son vécu. Une force étrange se dégage de ces pièces très expressives. Le regard, toujours vif, est primordial car il exprime la vie tout en décrivant l’âme, les sentiments, l’humeur. C’est le cas pour Bianga, la vieille lionne qui a mené de nombreuses chasses, subi quelques famines, élevé plusieurs portées et surtout vécu de nombreuses guerres de clans. Maintenant elle se méfie de tout et de tous... Cette expressivité est aussi manifeste pour ce macaque outré par ce qu’il vient d’apercevoir. Son étonnement mêlé d’indignation donne tout son sens au titre donné par l’artiste à cette pièce : Oh !!!. On peut encore évoquer ce Vieux loup qui a dirigé son clan pendant plusieurs saisons et déjoué bien des pièges ; il ne voit plus que d’un oeil, mais son regard énigmatique et insistant traduit sa détresse de se savoir plus vulnérable bien que plus expérimenté… Et que dire de ce Guépard étonné au regard si typique de l’animal surpris, ou de cette lionne qui sort de sa tanière où elle vient de mettre bas et dont le regard traduit toute sa crainte pour sa descendance.

Chaque animal, saisi dans le quotidien de son existence, dégage une vie intense que vient exacerber la force de l’instant choisi par l’artiste. Ainsi en est-il de cette Lionne en colère qui vient de manquer sa proie et devra se passer de repas, ou de cette femelle guépard, amaigrie, qui fait Le guet du haut de son rocher et scrute l’horizon à la recherche d’une proie ; si elle ne mange pas aujourd’hui elle n’aura plus la force de chasser. Quant au Lion combattant, il rugit de colère prêt à l’affrontement, tandis que la Lionne flairant hume l’air en quête d’une aubaine, tenaillée qu’elle est par la faim, et que le Guépard méfiant est sur ses gardes : il a entendu le rugissement des lions…

Approche

Avec les groupes, Vassil se donne pour dessein d’exprimer pleinement sa compréhension de la faune sauvage. Il se plaît à montrer les animaux dans la réalité de leur vie sociale en décrivant leurs codes et leurs langages corporels. Chaque groupe montre l’interaction entre des individus, chacun dégageant une personnalité propre, voire unique. Ainsi, avec Polaires (ourse polaire et son petit), nous côtoyons une mère inquiète de voir son petit si insouciant des dangers qui l’entourent, elle presse le pas sur la banquise en espérant que son jeune pourra la suivre. Elle sait que le grand mâle qui s’approche a faim et qu’il n’hésitera pas à attaquer son ourson. Avec Chasse aux impalas nous observons deux guépards affamés qui fondent sur le groupe de gazelles paniquées qui détalent dans toutes les directions. Quant à La fuite, elle met en scène deux impalas surpris qui bondissent pour échapper à une menace invisible.

Échappée belle

Vassil immortalise aussi des couples en totale harmonie dans le repos comme dans la chasse, ou bien encore des rivaux en lutte dont on ne sait lequel gagnera, tel Le choc qui présente deux cerfs en plein combat : l’un des deux a pris l’avantage, l’assaut est si brutal que l’autre en perd l’équilibre... La dynamique interne de ces pièces s’exprime à la fois par le mouvement et par le regard. Regard échangé entre animaux mais aussi regard des animaux envers les hommes, car les animaux de Vassil observent parfois le spectateur, qui devient alors un acteur de la composition.

Loin de tout académisme esthétique, l’œuvre de Vassil s’inscrit dans le contemporain sans tomber dans les méandres de l’abstraction. En fait, le maître mot de son art est l’expressivité de l’animal. Chaque pièce est compréhensible pour tous ceux qui se souviennent de leurs passions élémentaires. Dans toutes ses œuvres, il impose sa maîtrise du mouvement. Ses animaux sont immortalisés à un instant si précis, si intense, que l’action donne la vie au bronze. Il en est ainsi de La course du guépard, où le félin rapide et puissant sème tous ses poursuivants, mais aussi de Panique qui représente une gazelle de Thomson affolée qui tente de faire demi tour pour fuir son prédateur, ou encore de , l’Assaut de cette lionne qui bondit à travers les taillis pour s’emparer d’une proie…
Son œuvre d’un esthétisme raffiné témoigne de son sens artistique hors du commun et d’une parfaite maîtrise des techniques.

Les bronzes de Vassil sont fondus chez Chapon. L’artiste a obtenu de nombreuses récompenses dans les Salons et expositions animalières, parmi lesquelles médaille d’or à Gournay en 1996, médaille d’or à Clichy-sous-Bois en 1997, 2ème Prix de sculpture au Festival International Animalier de Sully-sur-Loire en 2000, premier Prix de sculpture au Salon International du Val d’or 2001, Prix Mori au Salon National des Artistes Animaliers de Bry-sur-Marne en 2002, Prix Sandoz et Prix « Wild in nature » en 2004…

Reconnu dans les Salons et dans tous les Festivals animaliers, primé à de nombreuses reprises, la force et l’originalité du travail de Vassil reposent sur cette représentation à la fois précise et suggérée de l’animal dans les différentes situations.
A travers ses sujets dont il se sert comme d’un prisme, il exprime en toute liberté sa vision personnelle de la faune sauvage et de sa place, trop souvent remise en cause dans nos sociétés .

Publication - Regards croisés - Recueil
Septembre 2012

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