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BUSATO Gualtiero

Dialogue, 1982

Gualtiero Busato naît le 14 avril 1941 à Civitavecchia en Italie. Il est le fils du sculpteur animalier Mario Busato–Strauss qui était aussi un fondeur d’art très connu et réputé pour la perfection de ses fontes et la qualité de ses patines. Il passe son enfance à Pérouse et en 1949 il part pour la France avec sa mère. La famille rejoint à Paris Mario Busato-Strauss qui a remis en activité la fonderie qu’il avait créée avant la guerre.

Dès son plus jeune âge, son père lui apprend à maîtriser le procédé de la fonte à la cire perdue, lui fait découvrir les secrets du métier de fondeur et lui communique l’amour du bronze. Le jeune Gualtiero est fasciné par cet environnement de feu et d’alliage en fusion. Il reste de longues heures près de son père à le regarder travailler. Lorsqu’il a à peine 12 ans, il fait des petits personnages en cire que son père coule dans le bronze pour lui faire plaisir. Sa vocation se dessine et prend forme. En père attentif, Mario Busato-Strauss l’accompagne dans cette voie en lui prodiguant ses conseils. En marge des courants et des modes, il va alors développer une œuvre très personnelle et très libre, baroque, frémissante, où se côtoient des personnages en fuite perpétuelle devant leur destin.

Sculpteur de figures, de compositions à personnages et de sujets religieux depuis les années 50, sa création s’exprime par le moyen du "petit bronze" qui lui permet de mettre en valeur la fluidité de son modelé. Pour mieux faire connaître ce mode d’expression, il fonde à Paris au début des années 1960, avec le concours de sculpteurs et de critiques parisiens de renom « L’exposition internationale du Petit Bronze ». Il traduit par le terme « petit bronze » le terme italien « bronzetto », employé couramment pour désigner une petite sculpture fondue en bronze et qui est à elle seule une œuvre complète. Son objectif est de présenter au public un vaste panorama de la sculpture contemporaine qui prend l’aspect de statuettes de petites dimensions, réalisées dans un matériau unique, le bronze. Il souhaite ainsi mettre en avant les qualités artistiques de telles œuvres.

Fugue de Numance, 1996

Gualtiero Busato réalise ses œuvres en bronze à cire perdue. Cette pratique ancestrale répond parfaitement à son souhait de conserver à son art un caractère artisanal. Et fort de son apprentissage dans la fonderie paternelle, il a adapté la technique de la fonte cire perdue à sa vision moderne de l’art. A partir de la cire d’abeille, il travaille par plaques de différentes épaisseurs qu’il découpe, soude, malaxe et modèle. Le moment de la coulée dans le bronze est toujours d’une grande intensité émotionnelle pour l’artiste qui voit, grâce à une alchimie mystérieuse, ses œuvres de cire, fragiles, délicates et éphémères se transformer en sculptures de bronze robustes et éternelles. Ses sculptures aux surfaces qui appellent et retiennent la lumière sur les plans essentiels, apparaissent alors enveloppées par la subtilité des ombres. Les plans s’entrecroisent, la lumière glisse sur les surfaces, s’accroche aux rugosités et ruisselle sur les modelés lisses tandis que les ombres sculptent les reliefs.

Ses personnages, chimériques et réels à la fois, retiennent l’attention par leur présence très humaine. Ils sont toujours dans l’action, ils marchent, ils courent, ils crient, ils s’agitent, parlent avec les mains, expliquent, font des gestes amples… et nous apparaissent chargés d’une dimension émotionnelle particulière. Enigmatiques, graves, intemporels, désemparés, ils sont porteurs d’une angoisse métaphysique, liée à la destinée de l’homme. Les traits du visage sont souvent estompés, voire effacés, mais l’expression est toujours prodigieusement préservée, et elle nous renvoie à nos peurs existentielles.

Seconde étude pour la Fontaine du Messager, 1995-1999

L’artiste travaille par séries : Bibliques, sa première série, commencée en 1958 et inspirée par les écritures saintes, en particulier par les Prophètes ; Masques de Calabre ; Fuites ; Nuvoloni (nuages) ; Gémeaux ; Dadini (petits dés) ; Formelle ; Couples ; Rencontres et Dialogues. Ce mode de travail lui permet de reprendre, année après année, un même sujet et de l’enrichir au fil du temps. Le thème naît, grandit, mûrit, évolue et conduit parfois à l’émergence d’une autre série lorsqu’il est à l’apogée de son développement.

Ainsi, Les Nuvoloni, « gros nuages » en italien est une série thématique commencée en 1960 où personnages et nuages se fondent dans des ciels éthérés. Les personnages sont en pleine discussion, coupés du monde dans leur nuage. On ne distingue que leur tête et leurs mains qui émergent de la masse nuageuse. Qui sont-ils ? Quel est leur mystère ? Quel est le sujet de leurs interminables palabres ? Nul ne sait. Sur le plan créatif, Les Nuvoloni trouvent leur plénitude et leur aboutissement dans la série des Rencontres et Dialogues et annoncent celle des Gémeaux, la plus abstraite produite par Gualtiero Busato. Dans la série des Nuvoloni, des éléments nécessaires à la coulée du bronze sont volontairement conservés par l’artiste pour servir de base à ces sculptures aériennes et vaporeuses.

En 1960, il commencer également une autre série, les Dadini, ce qui signifie les « dés à jouer ». L’artiste utilise cette formulation pour décrire un petit élément de bronze en forme de dé où se tiennent en équilibre un ou deux personnages.

En 1962, il entreprend deux séries : les Formelle et les Fuites. Les Formelle, mot italien qui désigne les hauts et bas reliefs qui décorent les portes des églises italiennes, représentent dans l’œuvre de Gualtiero Busato des plaques destinées à être accrochées au mur. Un personnage en relief s’en détache et attire l’attention par sa gestuelle.

Quant aux Fuites, elles constituent le thème emblématique de l’œuvre de Gualtiero Busato, son sujet préféré. La série compte à la fois des sculptures de toute petite taille, quelques centimètres, et des sculptures de plus de 3 mètres de haut. Elle met en scène des personnages qui courent droit devant eux, mains rendues, vêtements flottants, regard fixe. Ils semblent habités par la peur qui les contraint à une fuite éperdue. Depuis le début des années 60, l’artiste reprend ce thème à l’infini : Rythme (1962), Gnomo (1969), Fuga (1972) Fuite (1973), Fuite biblique (1974), Prophète en fuite (1975) en sont quelques exemples. En 1977, il réalise les premières études pour sa grande porte en bronze de 3 mètres de haut des Fuites et dialogues bibliques qui sera exposée en 1978 à la première Triennale Européenne de Sculpture dans les Jardins du Palais Royal à Paris, et en 1979 au Musée de la Monnaie à Paris. Cette Porte des Fuites et dialogues bibliques est une pièce maîtresse qui fait la synthèse entre plusieurs de ses séries. Elle rassemble des éléments issus des Fuites, des Nuvoloni, des Gémeaux, des formelles et aussi des Dadini, et les présente dans une composition juste et harmonieuse. En 1982-83, il complète la série des Fuites avec le grand bronze des Messagers, inauguré en décembre 1983 à la station de métro Saint Germain des Prés à Paris. En 2000, la série s’enrichit encore avec la Fontaine du Messager implantée à Angers.

La série des Masques de Calabre, dont l’idée lui est venue en 1964 au retour d’un voyage en Grèce, sert de fil conducteur à l’artiste pour dresser le portrait de personnages imaginaires symboles de l’angoisse muette que chacun porte en soi. Ils nous apparaissent les yeux mi-clos, la bouche ouverte, le visage figé de stupeur. Cette série est initiée par le Masque de Locri en 1965. En 1967, il crée le Masque de Gerace, suivi par le Masque Squillace en 1969 et de nombreux autres masques dont le Masque de Calabre en 1988, l’une des plus grandes réussites de ce thème, toujours d’actualité.

Ubaldo,1997

Enfin la série des Rencontres et Dialogues, qui représente l’évolution vers la figuration de la série des Nuvoloni, ses œuvres les plus abstraites, comporte parmi ses modèles l’imposante Fontaine du Dialogue inaugurée en 1989 au square Vivaldi à la défense à Paris. Elle a été suivie en 1994 par une autre Fontaine du Dialogue érigée place Louis Romain à Angers.

Gualtiero Busato participe depuis 1959, à de nombreuses expositions et Salons à Paris. Il est aussi présent en Grande Bretagne, en Belgique, aux États Unis, en Allemagne et en Italie. Entre 1968 et 1974, la Monnaie de Paris lui passe commande de plusieurs médailles. En 1974, il expose au Musée National d’Art Moderne de la Ville de Paris et, en 1981 une salle lui est consacrée à la deuxième triennale Européenne de sculpture au Grand Palais. En 1987, a lieu une exposition rétrospective sur « L’atelier Busato Père et Fils », sous l’égide de la Monnaie de Paris. Citons encore les expositions à la galerie Univers du Bronze en 1993, 1995 et 2005.

Les œuvres de Gualtiero Busato figurent au musée d’Art moderne de Madrid, au centre Georges Pompidou à Paris. En 2001, il a reçu le Prix del Duca de sculpture de l’Institut.

BUSATO. Catalogue raisonné des bronzes mai 2011

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